Voilà trois ans et demi que François Hollande, à l’image de Herbert Hoover déclarant en 1929 que « la prospérité est au coin de la rue », annonce la reprise. Voilà trois ans et demi que la reprise demeure introuvable en France tandis qu’elle s’épanouit dans le monde développé.
En 2015, la croissance atteindra péniblement 1 % dans notre pays tandis qu’elle s’élèvera à 2,8 % aux États-Unis, 1,8 % en Allemagne, 2,8 % au Royaume-Uni, 3,1 % en Espagne. Dès lors, le chômage continue à augmenter avec un nouveau record de 6,43 millions d’inscrits à Pôle emploi toutes catégories confondues, tandis que les États-Unis, l’Allemagne et le Royaume-Uni ont renoué avec le plein-emploi (taux de chômage respectifs de 5,3 %, 4,7 % et 5,6 %) et que l’Espagne a créé 510.000 postes de travail en un an.
Le constat est limpide : la France passe à côté de la reprise. En dépit de la configuration exceptionnellement favorable issue de la baisse du pétrole, des taux d’intérêt et de l’euro, la consommation stagne et l’investissement poursuit sa chute avec un nouveau recul de 0,3 %. Le timide redressement des exportations, quant à lui, est sous la menace du choc financier venu de Chine et du récent redressement de la monnaie unique face au dollar et aux devises émergentes.
L’incapacité de la France à sortir des crises qui ont affecté le capitalisme mondialisé à partir de 2007 puis la zone euro à partir de 2009 s’explique en partie par le passif accumulé au fil de près de quatre décennies de déclin. Pour autant, le décrochage actuel a pour première raison la politique économique conduite depuis 2012 qui interdit la reprise.
Le choc fiscal de plus de 50 milliards d’euros et le foisonnement des législations hostiles aux entreprises ont réalisé l’euthanasie de la production, de l’investissement et de l’emploi, tout en accumulant les déficits et les dettes. Les seuls soutiens à l’activité sont venus de l’extérieur, grâce au pouvoir d’achat et aux marges dégagés par la chute du prix de l’énergie d’une part ,à la baisse des taux et à la stratégie monétaire d’assouplissement quantitatif conduites par Mario Draghi à la tête de la BCE d’autre part.
En France, plus on parle de la reprise et moins on la voit. Et pour cause ! Ce n’est pas la reprise qui permettra les baisses d’impôts. Ce sont les baisses d’impôts, ciblées sur les entreprises et les créateurs de richesses, qui permettront la reprise. Et elles ont pour condition préalable des coupes significatives dans les dépenses publiques, concentrées sur les transferts sociaux et non pas sur l’investissement.
Or si les mots ont changé, les actes restent résolument hostiles à la croissance et à l’emploi. Les marges des entreprises, notamment des PME, poursuivent leur dégradation. La compétitivité est sinistrée, de l’agriculture à l’industrie en passant par la construction. Le financement de l’investissement est gelé par la répression financière et par la déliquescence de la place de Paris. La fiscalité confiscatoire accélère l’exil des hauts revenus, en hausse de 40 % en 2013, des jeunes entrepreneurs, des centres de décision et de recherche. Le marché du travail est désormais le plus rigide du monde développé. Le système éducatif s’effondre avec la suppression de ses pôles d’excellence. Les dépenses publiques poursuivent leur course folle, avec pour symbole la création de 8 300 nouveaux postes de fonctionnaires , tandis que les moins-values fiscales s’accumulent au rythme de la paralysie de l’activité. Le respect de l’engagement européen de réduire le déficit à 3,3 % en 2016 est hautement improbable. Et la dette publique dépassera 100 % du PIB en 2016.
Le retour de la croissance et du plein-emploi en France ne se joue ni à Pékin, ni à Washington, ni à Bruxelles mais à Paris. Depuis qu’Alexis Tsipras a fait son choix en faveur de l’euro contre la démagogie de Syriza, François Hollande demeure le dernier chef d’État et de gouvernement en Europe à refuser les réformes, en poursuivant son mouvement de bascule perpétuel entre la politique du Parti socialiste et la politique de la France.
La seule logique du quinquennat reste celle de l’envie et d’une poursuite obsessionnelle de l’égalité, dont Alexis de Tocqueville a pointé les risques : « Les peuples démocratiques ont pour l’égalité une passion ardente, insatiable, éternelle, invincible ; ils veulent l’égalité dans la liberté, et, s’ils ne peuvent l’obtenir, ils la veulent encore dans l’esclavage. » Ne pouvant obtenir l’égalité dans la liberté et la prospérité, François Hollande l’institue par la stagnation, la paupérisation, l’asservissement des Français à l’oppression fiscale et au carcan réglementaire.
(Chronique parue dans Le Figaro du 31 août 2015)