La France doit redéfinir une politique cohérente vis-à-vis de l’Algérie autour de cinq priorités.
Alors qu’Emmanuel Macron en a fait une des pierres angulaires de son parcours et de son identité politiques, en déclarant à Alger en février 2017 que« la colonisation est un crime contre l’humanité », puis l’une des priorités de sa politique étrangère jusqu’à provoquer une brouille diplomatique avec le Maroc, jamais l’Algérie n’a conduit depuis son indépendance une politique aussi délibérément et frontalement hostile à la France.
Sous l’affichage de la proximité entre les présidents Tebboune et Macron, sous le rituel des voyages en Algérie, sous les déclarations unilatérales de Paris appelant à tourner la page de la colonisation, pointe une profonde dégradation des relations entre les deux pays. Les entreprises françaises sont méthodiquement discriminées et la coopération se réduit à la multiplication des contentieux concernant les impayés qui leur sont dus. La culture et la langue françaises sont en voie d’éradication. Les demandes de laissez-passer consulaires nécessaires aux expulsions de citoyens algériens sont systématiquement refusées. Des encouragements et un soutien explicites ont été apportés par Alger aux émeutiers qui ont embrasé les villes sur tout le territoire. Dans le droit fil des obstacles dressés à l’intervention au Sahel, le régime algérien appuie les efforts de la Russie pour bouter la France hors du continent africain et organise des manœuvres militaires conjointes avec l’armée russe.
En réalité, soixante ans après l’indépendance, la seule source de légitimité de la dictature militaire comme de l’identité nationale algérienne reste l’éternel retour de la guerre d’indépendance et la détestation de la France. Et l’agressivité envers notre pays ne peut que croître avec la reprise en main de l’Algérie par l’État profond qui a brisé les espoirs et les militants du Hirak, avec l’incapacité du régime à casser la spirale du non-développement, avec la volonté de revanche du Sud global contre les anciennes puissances coloniales.
L’Algérie constitue avec le Venezuela le meilleur exemple de la malédiction des matières premières. Elle est un pays immensément riche ruiné par un régime dictatorial et corrompu ainsi que par le choix d’un modèle socialiste d’économie dirigée. L’économie connaît une apparente embellie liée à l’envol du prix des hydrocarbures, qui ont généré 69 milliards de recettes d’exportations, soit un niveau record depuis 2013.
La situation demeure cependant très fragile car cette manne financière n’est pas mise au service du décollage économique mais du financement du pacte politique pervers qui échange le déversement d’aides sociales contre le maintien de la dictature. Les dépenses publiques sont en hausse de 56 % dans la loi de finances complémentaire pour 2022, centrées sur l’augmentation de la rémunération des fonctionnaires, des allocations-chômage et des pensions de retraite, alors que l’investissement public diminue de moitié. La rente des hydrocarbures va de pair avec l’échec de la diversification et l’euthanasie du secteur privé.
L’omniprésence de l’État et la corruption endémique limitent drastiquement les investissements directs étrangers tandis que le chômage touche un quart des actifs et plus de la moitié des jeunes.
Le blocage du développement est indissociable de l’immobilisme du système politique. Il est plus que temps pour la France de sortir du déni sur la nature du régime algérien et sur sa stratégie de déstabilisation de notre pays. L’Algérie est un pays hautement stratégique pour l’équilibre de la Méditerranée et de l’Afrique du Nord comme pour celui du marché du gaz.
Elle est aussi une bombe à retardement, dont l’explosion programmée sera catastrophique pour la France. Sa population atteindra en effet 60 millions d’habitants en 2050 et son économie est promise à la ruine par la fin de la rente des hydrocarbures et l’accélération du réchauffement climatique.
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Chronique parue le 24 juillet 2023