La rupture est désormais actée entre le président et le Parlement, où la survie du gouvernement ne tient plus qu’à un fil, la société civile et les citoyens, ce qui le prive de toute capacité d’action
Alors qu’il a débuté son second quinquennat depuis moins d’un an, Emmanuel Macron se trouve dans une complète impasse. La fausse réforme des retraites – très loin de rétablir l’équilibre du système à l’horizon 2030 – accouche d’une vraie crise politique. La rupture est désormais actée entre le président et le Parlement, où la survie du gouvernement ne tient plus qu’à un fil, la société civile et les citoyens, ce qui le prive de toute capacité d’action.
L’intervention télévisée du président de la République est exemplaire, qui a cumulé le déni de la réalité, la défausse de ses responsabilités sur Élisabeth Borne – première ministre sacrificielle dont le courage va de pair avec un parfait contre-emploi -, l’absence de décision, de perspective et d’espoir. Négligeant les leçons du mouvement des « gilets jaunes » qui rappelle combien il est difficile d’arrêter la violence une fois libérée, son seul résultat a été d’enflammer les passions et de favoriser la formation d’une dangereuse coalition entre syndicalistes, travailleurs des secteurs protégés, classes moyennes, étudiants et militants radicaux. Ce n’est plus seulement l’Assemblée mais le pays entier qui est en voie de zadification, comme le montre la piteuse annulation de la visite d’État de Charles III d’Angleterre.
La réforme des retraites est symbolique d’un quinquennat mort-né, euthanasié par le tour de passe-passe d’Emmanuel Macron qui a escamoté la campagne présidentielle avant de se briser sur les élections législatives pour avoir tenté de rééditer la manœuvre. Un quinquennat placé en apesanteur par l’absence de tout projet pour le pays et annihilé par l’inertie conservée durant les premiers cent jours qui auraient dû être décisifs. La majorité très relative fait la vérité sur le macronisme qui se résume à la personne d’Emmanuel Macron, aujourd’hui réduit à la solitude et à l’impuissance.
L’échec est à la mesure de l’espoir de renouveau qu’Emmanuel Macron avait porté en 2017. Il est celui d’un homme, qui a réussi, par son arrogance et son mépris pour les citoyens, à se faire détester dans toutes les strates de la société, tout en contaminant le pays par son relativisme et son nihilisme. Il est celui d’une méthode, verticale et centralisée à l’extrême, qui prétend trancher de tout et décider pour tous depuis l’Élysée, ravalant le gouvernement à une escouade de zombies, le Parlement à un théâtre d’ombres ou un ring de catch, l’État à un conglomérat de courtisans cooptés et les citoyens à des enfants. Il est celui d’une politique qui a été vidée de toute clarté, de toute cohérence et de toute efficacité par la tyrannie du « en même temps ».
L’incapacité non seulement à réformer mais à gouverner condamne la France à une descente en vrille. L’immobilisme se paie comptant : productivité en baisse et croissance nulle ; services publics effondrés ; chômage permanent et paupérisation des Français ; double déficit commercial (7 % du PIB) et public (5 % du PIB) ; dette publique insoutenable de plus de 3 000 milliards ; nation atomisée et citoyenneté minée par le clientélisme social ; ascension des populismes.
Longtemps masquée, la chute de la France est désormais comprise et mesurée par les Français comme par nos partenaires européens, nos alliés et nos ennemis, des djihadistes aux empires autoritaires. Notre pays est programmé pour aller se fracasser contre le mur financier de la dette et le mur politique de l’arrivée au pouvoir de l’extrême droite. Les Jeux olympiques risquent fort de devenir l’emblème de ce naufrage en tournant au fiasco du fait de l’effondrement de l’État comme du délabrement et de la tiers-mondisation de Paris. Une crise politique ne peut avoir d’issue que politique. Une censure du Conseil constitutionnel ou l’aboutissement d’un RIP fourniraient une sortie juridique sans apporter de solution de fond. Seul un changement radical peut sauver Emmanuel Macron et son quinquennat.
Que faire ? Former un gouvernement resserré autour de personnalités fortes pour ne traiter que les questions décisives pour l’avenir du pays et de ses citoyens : l’augmentation de la production ; la remise à niveau de l’éducation, de la santé et des transports ; la modernisation de l’État ; la mobilité sociale et l’égalité des territoires ; le rétablissement de la sécurité et le réarmement. Avec qui le faire ?
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