L’enchaînement des crises rappelle l’urgence, pour l’Europe comme pour la France, de retrouver une souveraineté industrielle, monétaire et énergétique.
Invasion de l’Ukraine, vagues migratoires, épidémie de Covid, crises énergétique et alimentaire, changement climatique… Dans un contexte d’ensauvagement de la planète, de montée des risques systémiques, de désintégration des institutions et des règles multilatérales, la souveraineté et la réduction des dépendances s’imposent à nouveau comme un impératif.
De cette nouvelle donne les États-Unis sont les grands gagnants du fait de leur autonomie dans les domaines de l’énergie, de l’agriculture, de la technologie et de l’armement, mais aussi du statut de valeur refuge du dollar et de leur puissance financière, qui constituent autant d’armes au service de leur souveraineté. À l’inverse, la guerre d’Ukraine, après l’épidémie de Covid, a mis en évidence le défaut de souveraineté et la vulnérabilité de la France et de l’Europe.
La France tient le discours de la souveraineté sans jamais se donner les moyens de l’exercer effectivement. D’un côté, elle donne des leçons d’autonomie stratégique à l’Union et à ses partenaires. De l’autre, elle est aujourd’hui la moins souveraine des nations d’Europe. Du fait de sa désindustrialisation et de l’euthanasie de ses filières d’excellence – à l’image du nucléaire, de la pharmacie ou de l’agriculture –, elle dépend désormais de l’Allemagne pour l’électricité, des Pays-Bas et de l’Europe du Sud pour son alimentation, de la Chine pour les biens de première nécessité, des États-Unis pour la technologie, avec à la clé un déficit commercial de 160 milliards d’euros. L’Union, fondée sur le droit et le marché, se trouve déstabilisée par l’obligation de se refonder autour de la souveraineté. Elle fait face à un triple échec : économique – du fait de son allégeance à la Russie pour l’énergie, à la Chine pour les biens de première nécessité, aux États-Unis pour la technologie et l’armement –, politique – à la suite de la déroute du mercantilisme face aux empires autoritaires –, stratégique et moral – face au retour de la guerre de haute intensité. Alors que l’affirmation de sa souveraineté passe par le renforcement de son intégration, elle se trouve écartelée par les divergences entre les États membres, notamment entre la France et l’Allemagne.
Pour la France comme pour l’Europe, il est grand temps de passer des mots aux actes. Le rétablissement de la souveraineté de notre pays passe par une transformation radicale du modèle fondé sur la consommation à crédit. Et ce à travers plusieurs priorités. Une politique de l’offre tendue vers l’investissement et l’innovation dans les secteurs de l’énergie, de la santé, de l’agriculture ou de l’armement. Le rétablissement de la vérité des prix pour les produits et les services de base, notamment la santé, qui doit être pilotée par la qualité des soins et non par la gratuité. Le réinvestissement dans l’État régalien et l’État stratège, qui ont été cannibalisés par l’État-providence.
L’urgence n’est pas moins forte pour l’Union, prise en tenailles entre la force de frappe financière des États-Unis et la divergence des États membres….
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