Nicolas Baverez signe pour Le Point un article dense, en une du magazine : « Peut-on (encore) éviter le déclin ? ». Extrait.
L’épidémie de Covid-19 a jeté une lumière crue sur les fragilités et l’affaiblissement de la France. Elle a vu l’État perdre le contrôle de la situation sanitaire, économique, financière et sécuritaire. Notre pays n’en sort pas grandi ou renforcé mais diminué et dégradé, ayant perdu la maîtrise de son destin, qui dépend de la Chine pour la fourniture des biens essentiels, des États-Unis pour la technologie et de l’Allemagne pour le financement de sa dette. Avec près de 5 millions de cas de Covid et 100 000 morts, ainsi qu’une récession historique de 8,3 % du PIB en 2020 – contre 3,5 % et 5 % du PIB aux États-Unis et en Allemagne –, la France figure parmi les pays les plus touchés par l’épidémie. La limitation des faillites, l’endiguement du chômage et la préservation du revenu disponible des ménages n’ont été obtenus en 2020 qu’au prix d’une envolée de la dette publique, passée de 98,1 à 118,7 % du PIB, soit environ 40 000 euros pour chacun des 67 millions de Français. Simultanément, le déficit commercial a atteint 65 milliards d’euros et les parts de marché des exportations dans la zone euro ont reculé de 1,2 point.
Par ailleurs, la relance, pour être forte, sera très inégale. Elle bénéficiera aux pays qui s’y engageront les premiers, en fonction de l’avancement de la campagne de vaccination, de la puissance et de la rapidité de mise en œuvre des plans de soutien, de la compétitivité des systèmes productifs. Or la France cumule plus de deux mois de retard dans la vaccination, une priorité mise sur les mesures d’urgence au détriment de la relance, la taille insuffisante et le caractère tardif du plan européen, un déficit majeur de compétitivité. Elle s’apprête donc à manquer la reprise de 2021, comme celles de 1995 et de 2009, et pourrait ne retrouver qu’en 2023 son niveau d’activité de fin 2019, alors que ce sera le cas dès 2021 pour les États-Unis et l’Allemagne.
Le risque d’un effondrement économique et social devient bien réel. Les pôles d’excellence français ont été touchés de plein fouet et durablement déstabilisés, à l’image de l’aéronautique, de l’automobile, de la restauration et de l’hôtellerie, du tourisme et de la culture, amputant durablement l’appareil productif de 5 à 6 % de son potentiel. L’appauvrissement inéluctable des ménages, du fait du chômage et de la baisse des revenus, ira de pair avec une forte montée des inégalités. L’État verra…
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