Education, les vraies réformes restent à venir.
L’éducation ne relève plus en France de mesures cosmétiques mais de réformes systémiques.
Dans l’économie et la société de la connaissance du XXIe siècle, la maxime de Leibniz selon laquelle « l’éducation peut tout » n’a jamais été aussi juste.
L’éducation détermine la richesse des nations et la compétitivité des entreprises. Elle conditionne l’adaptation à l’ère numérique.
Elle constitue l’instrument le plus efficace pour l’intégration et la lutte contre les inégalités. Elle fournit le socle de la démocratie, car elle transforme les individus en citoyens en les formant à l’exercice de la raison critique et à la responsabilité. Pour toutes ces raisons, il n’est pas de meilleur investissement.
Mais la formule de Leibniz joue dans les deux sens : une éducation performante représente un facteur de développement, de cohésion sociale et de puissance décisif ; une éducation inefficace est un handicap insurmontable et voue au déclassement les individus, les entreprises et les nations.
Il est impératif de s’attaquer aux causes profondes de la crise de notre système éducatif, au lieu de multiplier les annonces sur des questions périphériques. Et, pour cela, de sortir du déni entretenu autour de l’ampleur de son effondrement. Il concerne tout d’abord ses performances : 46 % des élèves entrant en sixième ne maîtrisent pas la lecture et l’écriture ; les enquêtes de l’OCDE placent la France en 29e position sur 31 pour les mathématiques et les sciences ; le taux de réussite atteint 95 % pour le baccalauréat général, 90 % pour la filière technologique et 82 % pour la filière professionnelle mais 21 % des adultes sont illettrés. Les inégalités ne cessent de s’amplifier, 77 000 jeunes sortant chaque année du système sans aucune qualification – soit 11 % d’une génération – pour un coût estimé à 25 milliards d’euros par an. La débâcle touche aussi les enseignants.
L’attractivité du métier chute, comme le montrent la baisse de 40 000 à 15 500 des candidats au Capes depuis 2000 ainsi que la multiplication des démissions.
Le réinvestissement dans le primaire (sous-financé de 7 % par rapport à la moyenne de l’OCDE quand le secondaire est surdoté à hauteur de 18 %) et l’incitation aux apprentissages précoces. La réhabilitation matérielle et morale du métier de professeur, en contrepartie d’une déconcentration de leur gestion et d’une modification des affectations en fonction des besoins des élèves.
D’où la progression de 27 % depuis 2015 du recrutement de contractuels – sous-qualifiés et rémunérés – qui accompagne la pénurie des professeurs diplômés, par ailleurs enfermés dans des statuts rigides. À l’égal de la santé, la situation est critique puisque 330 000 enseignants partiront à la retraite d’ici à 2030.
La faillite de l’éducation ne trouve pas son origine dans le manque de moyens puisque le budget s’élève à 64,2 milliards d’euros pour 12 millions d’écoliers et lycéens et que la dépense intérieure d’éducation a progressé de 6,5 % à 7 % du PIB depuis 1980 – largement au-dessus de la moyenne de l’OCDE.
La décentralisation auprès des régions et l’autonomie des établissements (10 % des décisions sont prises localement contre 63 % dans l’OCDE), indissociables de la débureaucratisation (250 000 agents exercent des missions étrangères à l’enseignement). L’égalité de traitement entre secteur public et privé avec la suppression du plafond de 20 % des moyens financiers et humains affectés au privé. La systématisation de l’évaluation et de la transparence pour les élèves comme pour les professeurs et les établissements.
Elle s’explique d’abord par une organisation figée et dysfonctionnelle, marquée par un centralisme paralysant qui affecte les moyens humains et financiers selon une logique bureaucratique qui ne prend jamais en compte la qualité de l’enseignement, par l’absence d’autonomie des établissements, par le refus de l’évaluation et de la transparence à tout niveau. Elle découle ensuite du déclassement, de la sous-formation et du mépris envers les professeurs.
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Chronique parue le 11 septembre 2023