L’espace offre une nouvelle et cruelle illustration du grand écart qui se creuse entre les mots et les choses en matière de souveraineté de l’Europe.
L’espace, après la période de désengagement qui succéda à la chute du soviétisme, s’affirme comme une infrastructure essentielle. Il est au XXIe siècle ce que la mer fut au XIXe : qui contrôle l’espace contrôle la terre.
L’espace est devenu clé pour la souveraineté des nations, la compétitivité des économies et la recherche scientifique. La remarquable résistance de l’Ukraine à l’agression de la Russie s’explique par sa capacité à gérer en temps réel le champ de bataille, permise par le renseignement spatial américain. Simultanément, la militarisation de l’espace se poursuit à marche forcée en dépit du traité de 1967, notamment avec les programmes de missiles, de laser et d’armes électromagnétiques antisatellites. L’espace est tout aussi vital pour le développement des services numériques, dont le marché devrait représenter 1 200 milliards de dollars au cours des deux prochaines décennies : Elon Musk et Jeff Bezos rivalisent ainsi pour le déploiement de leurs constellations de satellites, Starlink (3 000 satellites déployés sur un programme de 30 000) et Kuiper. Il est aussi déterminant pour l’observation de la terre, la modélisation et la gestion du changement climatique.
Un demi-siècle après les premiers pas de Neil Armstrong sur la Lune, la conquête spatiale se trouve donc relancée. Le succès d’Artemis 1, qui a permis de qualifier le lanceur lourd SLS – le plus puissant depuis Saturne 5, qui assura les missions Apollo – , et du vaisseau Orion prépare le retour des États-Unis sur la Lune, avec pour objectifs une station en orbite lunaire ouvrant la possibilité de vols habités vers Mars dans les années 2030. La Chine n’est pas en reste, qui poursuit la construction de sa station spatiale CSS, alors que l’ISS est en fin de vie, développe un projet de base lunaire avec la Russie et poursuit l’exploration robotisée de la Lune et de Mars. L’Inde participe également activement à la course à l’espace, en déployant des lanceurs légers très efficaces et en réussissant à envoyer un orbiteur martien.
Prenant conscience de ce que l’accès à l’espace est stratégique dans un système mondial où la géopolitique a pris le pas sur l’économie, la résilience sur l’intégration et la souveraineté…
Lire la suite de l’éditorial sur lefigaro.fr