Face à l’impuissance de leurs dirigeants dans la lutte contre le terrorisme, les Français sont en passe de basculer dans la révolte.
L’attentat qui a coûté la vie à Stéphanie Monfermé, agente administrative en poste au commissariat de Rambouillet, est la 42e attaque terroriste depuis 2012. Il rappelle que la France reste une cible privilégiée du djihadisme.
Selon un rituel désormais bien huilé, se sont succédé hommage national, présence du chef de l’État aux funérailles, Légion d’honneur à titre posthume pour la victime, annonce d’un nouveau projet de loi censé renforcer l’arsenal de lutte contre le terrorisme.
Venant après la décapitation de Samuel Paty, ce nouvel attentat marque cependant un tournant. Les Français sont en passe de basculer de la lassitude à la révolte devant l’impuissance de leurs dirigeants, qui considèrent le terrorisme comme une fatalité. La moitié d’entre eux se déclarent ainsi favorables à l’intervention de l’armée pour rétablir l’ordre public de sa propre initiative – solution aussi simpliste qu’absurde qui témoigne du désarroi des citoyens.
La France est ainsi entrée dans une configuration à très haut risque avec le cumul d’une envolée des violences et de leur généralisation à tout le territoire – des troubles urbains au terrorisme en passant par la délinquance et les rixes, d’une perte de contrôle de l’ordre public, de la défiance envers la justice et de la dénaturation de l’État de droit au fil de mesures législatives disparates qui portent atteinte aux libertés sans endiguer l’insécurité. Notre pays recule face au djihadisme qui ne cesse de renforcer son emprise sur des pans entiers du territoire et de la population, notamment la jeunesse. La restriction des libertés accompagne l’effondrement de la sécurité.
L’effondrement de la sécurité en France n’a rien de surprenant. Il résulte de la déliquescence des fonctions régaliennes de l’État qui ont été cannibalisées par la protection sociale qui absorbe 34 % du PIB. La première des priorités porte donc sur le réinvestissement dans la sécurité intérieure, afin de renforcer les capacités d’anticipation, de protection et d’intervention. Ceci suppose de remédier aux points faibles de la police et de la gendarmerie qui portent moins sur les effectifs que sur un triple déficit de planification, de commandement des opérations et d’équipements, particulièrement dans le domaine numérique.
Le réinvestissement dans la sécurité intérieure est vain s’il n’est pas accompagné d’une réforme radicale de la justice. Celle-ci a en effet perdu toute autorité en raison de sa paupérisation d’une part – qui s’est traduite par sa mise à l’arrêt pendant trois mois en 2020 unique au sein des démocraties -, de sa prise en otage par le corporatisme des magistrats qui se sont érigés en ordre nobiliaire imposant sa morale et ses mœurs à l’État et à la société d’autre part. Pour être crédible, la justice doit être rapide et effective (100 000 peines de prison sont inappliquées), ce qui est parfaitement compatible avec les règles de l’État de droit comme le prouvent le monde anglo-saxon ou l’Europe du Nord. La justice doit pour cela devenir un pouvoir à part entière, ce qui implique un doublement de ses moyens mais aussi une profonde transformation de la formation et de la culture des magistrats, qui doivent renouer avec le respect des citoyens, du droit et des libertés.
Il n’est pas de stratégie de sécurité qui ne repose que sur le pilier sécuritaire.
La désintégration de l’ordre public est la conséquence directe de la balkanisation de la société et de la décomposition de la nation. Un formidable effort d’intégration doit être engagé, avec pour cible la jeunesse et pour levier l’éducation.
Sa contrepartie consiste dans la maîtrise de l’immigration à travers l’instauration de quotas et une lutte effective contre les clandestins (selon la Cour des comptes, 15 % seulement des décisions d’expulsion sont suivies d’effet). Simultanément, l’Union doit reprendre le contrôle de ses frontières extérieures et s’assurer de l’identification et du suivi de tout étranger qui entre dans l’espace de Schengen.
L’impuissance devant la violence et la désagrégation de l’État de droit ne relèvent d’aucune fatalité ; elles sont le produit du renoncement et de la démagogie de nos gouvernants. Il est parfaitement possible de lutter contre le terrorisme de manière efficace et respectueuse des libertés publiques. Mais à trois conditions.
- Sortir du déni et appeler nos adversaires par leur nom, en évitant de qualifier l’islamisme de séparatisme ce qui n’a aucun sens.
- Déployer dans la durée une stratégie cohérente.
- Assumer nos valeurs.
Dostoïevski rappelait que « toute société, pour se maintenir et vivre, a besoin absolument de respecter quelqu’un et quelque chose ». On ne peut pas en même temps prétendre défendre la République et revendiquer la déconstruction de l’histoire de France.
(Chronique parue dans Le Figaro du 3 mai 2021)