« Moi, président de la République »… un bilan sans concession du quinquennat de François Hollande.
Le 6 mai, c’est mon véritable anniversaire. Voilà quatre années que j’ai pris en main le destin de la France. Moi, le bricolo du marché de Tulle, j’ai ma boîte à outils. J’ai compris dès le soir de mon élection qu’elle ne me laissait que deux solutions : me hisser à la hauteur de la fonction présidentielle ou bien réduire la France à ma dimension. Là, je me savais souverain et j’ai donné ma pleine mesure. Juges-en plutôt.
Moi, président de la République, j’ai rétréci la population. D’un côté, j’ai diminué de 20 000 le nombre annuel des naissances en matraquant les familles à grands coups d’impôts, de coupes dans les allocations pour les classes moyennes, de remises en question des emplois familiaux. De l’autre, j’ai poussé les riches à l’exil avec une fiscalité confiscatoire qui les fait fondre de 8 % par an. Je ferai aussi bien que Louis XIV avec la révocation de l’édit de Nantes : 80 000 hauts potentiels fuient la France chaque année pour le plus grand bonheur de Londres, Bruxelles, Genève, San Francisco ou Hongkong.
J’ai rétréci le travail Moi, président de la République, j’ai rétréci l’activité au moment où tous les grands pays développés, jusqu’à la zone euro, prenaient le train de la reprise. Agriculture, industrie, services, place financière, construction, il n’est pas un secteur que mon activisme réglementaire et fiscal n’ait gelé ou plongé dans la récession. Avec plus de 600 fermetures d’usines, j’ai infligé à l’industrie un grand bond en arrière en ramenant sa production à son niveau de 1994. Moi, président de la République, j’ai rétréci le travail en créant 700 000 chômeurs supplémentaires quand les Etats-Unis, l’Allemagne ou le Royaume-Uni renouaient avec le plein-emploi. Je n’ai pas réussi à inverser la courbe du chômage, mais j’ai parfaitement stabilisé celle de l’emploi marchand, qui a rejoint son niveau de 2002, quand la France comptait 6 millions d’habitants de moins qu’aujourd’hui.
Moi, président de la République, j’ai aussi rétréci l’enseignement en éradiquant les pôles d’excellence. J’ai programmé la disparition des classes européennes et des classes bilangues, du latin et de l’allemand. Moins il saura lire, écrire et compter, plus un jeune sera un client pour la garantie universelle de revenu !
Moi, président de la République, j’ai rétréci les libertés en inventant l’état d’urgence permanent. Ce qui restait d’autorité judiciaire a été transféré au pouvoir exécutif. Et puisqu’on m’a privé de la constitutionnalisation de l’état d’urgence, je l’ai introduit dans le droit commun. Il est injuste de prétendre que je n’ai pas réformé. J’ai redessiné les droits de l’homme dans leur patrie. Désormais, tout ce qui n’est pas défendu par la loi peut être interdit. La force publique est utilisée pour l’utilité exclusive de ceux auxquels elle est confiée. Enfin, la propriété étant un vol, chacun en est privé par l’impôt. Voilà la liberté des vrais modernes.
Président petit bras Moi, président de la République, j’ai rétréci les armées, même si je n’encours pas le reproche d’avoir joué petit bras en matière d’interventions militaires. Du Sahel à la Syrie en passant par la Centrafrique et par le déploiement de Sentinelle sur le territoire national, je fais la guerre sur tous les fronts. Mais les moyens n’ont jamais suivi. Pour la défense comme pour l’économie, j’aurai consommé en cinq ans tout le capital accumulé par les générations précédentes. À ce rythme, d’hommes et de matériels il ne restera plus rien en 2020. Mais je ne doute pas que la paix perpétuelle se sera imposée d’ici là.
Moi, président de la République, j’ai rétréci la diplomatie. Bien sûr, il y a l’accord de la COP21 que tous signent d’autant plus volontiers qu’il ne comporte aucun engagement contraignant. Pour le reste, j’ai bâillonné la voix de la France. Au G20 ou à l’Onu, plus une initiative ! Dans les négociations sur la Syrie, le conflit israélo-palestinien ou l’Ukraine, ma place est sur le strapontin. Moi, président de la République, j’ai rétréci l’Europe. J’ai presque trouvé mon maître en démagogie avec David Cameron et son référendum sur le Brexit. Mais c’est bien moi qui ai fait exploser le couple franco-allemand en mobilisant l’Europe du Sud contre l’austérité, en encourageant Alexis Tsipras dans sa surenchère sur la réduction de la dette grecque – répétition générale pour celle de la France -, puis en sapant le leadership d’Angela Merkel autour de la crise des migrants. Ma petite France n’a nullement besoin d’une Europe forte. Moi, président de la République, j’ai rétréci l’État. Non pas ses dépenses ou ses dettes. Là, j’ai été grand seigneur grâce à mon amie la finance. Vivent les taux négatifs de Mario Draghi : plus j’endette la France, moins je paie, plus l’ardoise, à terme, sera salée pour les Français. Non, ma vraie cible, ce sont l’autorité et l’efficacité de l’État. Les libéraux devraient me dresser une statue.
Quel autre président de la Ve République a fait plus pour désintoxiquer les Français de l’État en le transformant en objet de rire et de mépris ? Avec moi, fini la monarchie républicaine. Retour à la bonne vieille IVe République, avec son impuissance, ses jeux partisans et son mouvement incessant de culbuto. Dans mes gouvernements, nul besoin de légitimité ou de compétence. Tout parlementaire inconnu peut connaître sa minute de célébrité ministérielle en se voyant confier le portefeuille de l’Égalité réelle ou de la Biodiversité. Quant aux nominations aux postes clés de l’État, j’applique une condition simple : l’appartenance à ma promotion Voltaire de l’Ena. Même la politique Moi, président de la République, j’ai rétréci la politique. Comme je l’ai rappelé à cet insolent d’Emmanuel Macron, elle n’est pas faite de projets au service du pays. La politique, la vraie, n’est pas affaire d’idéaux, mais d’intérêts. Elle est tissée d’un réseau d’allégeances et de clients. Présider, c’est distribuer !
Moi, miniprésident d’une mini-France, je fais le minimum. Mais j’entends bien continuer à le faire longtemps. Depuis quatre ans, j’ai rétréci la France. Pour être réélu, je vais rétrécir les Français. Le général de Gaulle se fourvoyait avec ses rêves de grandeur ; mais il visait juste en affirmant que les Français sont des veaux. Hé oh ! chérie, elle n’est pas belle, ma France ?
(Chronique parue dans Le Point du 04 mai 2016)
Philippe Cases
Grand fan de Ncolas Baverz que j’ecoutes religieusement lors qu’il passe a l’economie en question, je suis surpris par cet article. Le quinquennat de Hollande n’est pas une reussite mais on sait pourquoi;la hausse d’impot de 2012 visait a rembourser la dette et remettre la France sur la voie de l’equilibre budgetaire. Ceci est lie a l’orthodoxie budgetaire de la zone Euro et de Angela Merkel en particulier. Cette hausse d’impot n’a pas porte les effets escomptes mais on le savait d’avance.
En matiere de defense et de relations etrangeres, je trouve que la France a maintenu son rang en Afrique par exemple, dans un monde qui devient de plus en plus mutii-polaires. Les agressions terroristes ont forcement eu un effet aussi sur notre diplomatie.
Il y a eu des avancees sociales dans bien des endroits: mariage pour tous…..
Je n’ai jamais ete un fan d’Hollande et de son programme mais il faut ne pas etre injuste non plus.