Le quinquennat de François Hollande a déjà ruiné le pays. Deux voies s’ouvrent à lui : devenir l’homme de la nation, ou rester l’homme d’un parti.
Les élections municipales de 2014 resteront comme un moment politique clé où le peuple français a repris d’une main ferme la barre des mains du président le plus médiocre de la Ve République et d’un Parti socialiste qui, loin de faire son aggiornamento social-démocrate, s’est abandonné aux délires idéologiques d’une armada de Khmers roses.
Comme en 1983, les électeurs ont avancé masqués pour frapper d’autant plus fort. Au fil de deux décennies de victoires aux élections locales qui avaient préparé le grand chelem de 2012, le Parti socialiste a conquis tous les pouvoirs. Les Français vont tous les leur reprendre, en commençant par les intercommunalités et les communautés d’agglomération, et en poursuivant avec le Sénat et les régions.
Loin d’être locales, ces élections municipales marquent l’acte de décès du quinquennat de François Hollande. Muré dans le Palais de l’Élysée, cultivant l’ambiguïté pour mieux se défausser de sa responsabilité première dans la débâcle, il ne trompe plus personne. Son parti et ses amis ont payé, parfois à l’excès, le prix de ses erreurs et de son indécision.
La seule cohérence du quinquennat reste un anti-sarkozysme obsessionnel qui a permis de remporter l’élection présidentielle mais ne permet ni de présider ni de résoudre la crise nationale. Les Français n’ont pas élu François Hollande pour rejouer sans fin l’élection de 2012 mais pour redresser le pays.
En moins de deux ans, François Hollande a non seulement ruiné l’économie et paupérisé durablement les Français mais aussi compromis la paix civile, dégradé l’État de droit par la violation systématique des droits de la défense qui sont aussi importants pour les libertés que l’indépendance des magistrats, aliéné la souveraineté de la nation, ravalé la France en objet universel de rire et de mépris. Or, les Français peuvent beaucoup pardonner à leurs dirigeants, mais pas l’humiliation de la France.
Loin d’engager les réformes indispensables, François Hollande s’est cantonné à la politique de son parti. Il a affermé l’État et corrompu la République en distribuant les postes et les prébendes. Il a cultivé le déni de la crise, alors même qu’il accumulait les revers sur le retour de la croissance, l’inversion de la courbe du chômage, la réduction des déficits par un choc fiscal qui a laminé les classes moyennes. Il a flatté la haine des riches, de l’entreprise et de la famille. Il a cherché à exacerber l’anti-germanisme dans l’Europe du Sud. Il a encouragé un totalitarisme mou qui institutionnalise le mensonge et pervertit le langage, qualifiant le déclin de poursuite du redressement, la hausse du chômage d’inversion de la courbe des chômeurs, l’effondrement de l’ordre public de réhabilitation des valeurs de la République.
Loin de triompher, l’opposition devrait en tirer les leçons. Car sous la pseudo-vague bleue pointent une colère et un dégoût profonds des citoyens envers la classe politique qui n’épargne nullement l’UMP.
Le président le plus faible et le plus impopulaire de la Ve République va devoir choisir entre la politique de son parti et la politique de la France qu’il a semblé vouloir considérer depuis ses vœux pour 2014. Mais sans, pour l’heure, se donner les moyens de la mettre en œuvre. Faute d’avoir eu le courage de décider des réformes au début de son quinquennat, elles vont s’imposer à lui dans les pires conditions : une économie à l’arrêt, un chômage explosif, des déficits et des dettes hors de tout contrôle ; une nation au bord de la guerre civile, une démocratie gangrenée par l’extrémisme ; un premier ministre et un gouvernement suicidés, une majorité parlementaire en pleine crise de nerf et un Parti socialiste en état de choc ; une défiance viscérale de la part des dirigeants étrangers et un discrédit croissant auprès des marchés et des investisseurs internationaux.
Le 29 janvier 1848, à quelques semaines de la Révolution, Alexis de Tocqueville concluait en ces termes son discours à la Chambre des députés : « Gardez les lois, si vous voulez, quoique je pense que vous ayez grand tort de le faire ; gardez même les hommes si cela vous fait plaisir : je n’y fais pour mon compte aucun obstacle ; mais, pour Dieu, changez l’esprit du gouvernement, car cet esprit-là nous conduit à l’abîme. »
Tel est bien le dilemme de François Hollande. Soit changer radicalement l’esprit de son quinquennat, en tournant le dos à la démagogie qui a dominé sa campagne et ses deux premières années de mandat pour devenir enfin l’homme de la nation et de son redressement. Soit rester l’homme de son parti, apporter la preuve définitive qu’il est indigne d’exercer la fonction qu’il occupe, et accélérer la course à l’abîme du pays qui finira par l’emporter dans sa chute.
(Chronique parue dans Le Figaro du 31 mars 2014)